Le forban

A moi forban, que m'importe la gloire.
Les lois du monde, et que m'importe la mort
Sur l'océan j'ai planté ma victoire,
Et bois mon vin dans une coupe d'or.
Vivre d'orgie est ma seule espérance.
Le seul bonheur que j'ai pu conquérir,
Si sur les flots j'ai passé mon enfance,
C'est sur les flots qu'un forban doit mourir.

Vin qui pétille, femme gentille
Sous tes baisers brûlants d'amour, oui d'amour
Dans la bataille, mort aux canailles !
Je vis, je chante et je bois tour à tour.
Peut-être au mât d'une barque étrangère,
Mon corps un jour servira d'étendard,
Et tout mon sang rougira la galère.
Aujourd'hui fête et demain le hasard.
Allons esclave, allons debout, mon brave,
Buvons le vin et la vie à grands pots,
Aujourd'hui fête et puis, demain peut-être,
Ma tête ira s'engloutir dans les flots
Peut-être un jour sur un coup de fortune,
Je capturerai l'or d'un beau galion.
Riche à pouvoir nous acheter la lune,
Je partirai vers d'autres horizons.
Là, respecté tout comme un gentilhomme,
Moi qui ne fus qu'un forban, qu'un bandit,
Je pourrai comme un fils de roi, tout comme
Finir peut-être dedans un bon lit.